Ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy a construit ou renforcé un dispositif légal et réglementaire qui fait de la répression la seule solution à tous les problèmes, au détriment des impératifs de prévention, d’éducation, de santé et de solidarité. Quand il fixe par exemple l’interpellation des usagèrEs de drogue comme priorité, le ministère de l’intérieur sait que ces dernièrEs éviteront les lieux où l’on peut les reconnaître - à commencer par les structures de prévention et d’échange de seringues. Quand il organise l’arrestation massive de prostituéEs, il les condamne à travailler dans des lieux toujours plus isolés, loin des actions de prévention, plus exposéEs aux violences.
Ministre des finances, Nicolas Sarkozy a montré qu’il sacrifiait la santé à des impératifs budgétaires. Il a ainsi accompagné la réforme de la Sécurité sociale, qui a créé un impôt injuste sur la maladie et le handicap (le forfait non remboursable de 1 euro) et imposé aux personnes un parcours de soins contraignant. Il a milité pour le démantèlement de l’Aide Médicale d’Etat et remis en cause l’accès aux soins des malades sans-papierEs. Il a refusé d’augmenter de façon significative la contribution française à la lutte contre une pandémie qui tue 10 000 personnes par jour.
La lutte contre le sida est affaire de volonté politique. Nicolas Sarkozy y oppose d’autres impératifs : la démagogie sécuritaire, une volonté d’économiser l’argent public et de diminuer les impôts des plus riches en rognant sur des dispositifs vitaux, le refus de considérer les vies de toutes les personnes, même des plus précaires, même des plus exclues, sur un plan d’égalité.
Le bilan que nous traçons de ces cinq années de pouvoir le montre suffisamment : si Nicolas Sarkozy était réélu, nous, malades du sida, minorités, précaires, excluEs, n’y survivrions pas.
Droit au séjour des étrangèrEs malades
Concernant les étrangèrEs atteintEs de pathologies graves, la loi française prévoit deux dispositions : l’inexpulsabilité des personnes sans-papier et la délivrance de plein droit d’une carte de séjour temporaire pour celles et ceux dont l’état de santé nécessité une prise en charge médicale, dont le défaut pourrait entraîner « des conséquences d’une exceptionnelle gravité », et qui ne pourraient « effectivement bénéficier » d’un traitement dans leur pays d’origine. Nicolas Sarkozy n’a eu de cesse de chercher à restreindre cette protection juridique, faisant courir le soupçon systématique de fraude chez les étrangèrEs malades.
Positions publiques et décisions
Avec deux lois sur l’immigration en moins de 3 ans, des textes réglementaires innombrables, des prises de position publiques tout aussi massives, les étrangèrEs et leurs droits ont été une cible de choix pour Nicolas Sarkozy. Les malades n’y ont pas échappé :
Nicolas Sarkozy et sa garde rapprochée ont sans arrêt dénoncé le soi-disant détournement du titre de séjour pour raisons médicales [1]. À l’appui de cette thèse fantasmatique, il cite les chiffres des demandes et des titres obtenus : 18 572 demandes en 2005. Il oublie simplement de préciser que ces données cumulent les nouvelles demandes et les demandes de renouvellement. Or, depuis la loi Sarkozy de novembre 2003, les étrangèrEs malades n’ont plus droit à une carte de dix ans. Ils et elles sont donc condamnéEs à renouveler annuellement leur titre de séjour, ce qui gonfle les chiffres d’autant. Une analyse honnête comparerait les chiffres des seules premières demandes. Ce détournement des indicateurs est révélateur des pratiques malhonnêtes de Nicolas Sarkozy, et de sa volonté de faire passer les étrangèrEs pour des fraudeurSEs.
Ces positions publiques incitent immédiatement les préfectures à faire du chiffre et à contourner la loi pour refuser à des malades un titre de séjour : rupture du secret médical, délivrance abusive et répétée d’autorisations provisoires de séjour (APS, qui n’autorisent pas l’accès à un revenu ou un emploi), refus abusif de délivrance d’un titre, etc. Entre 2003 et 2006, le COMEDE a par exemple observé que plus de la moitié de leur recours contentieux sur ces refus de titre de séjour pour raison médicale ont donné raison aux demandeurSEs. C’est bien la preuve que les pratiques des préfectures sont totalement infondées.
Nicolas Sarkozy a voulu à de nombreuses reprises modifier la protection des malades étrangèrEs : circulaire de janvier 2003, amendement Mariani dans le projet de loi discuté en 2003, projet de loi que nous avons rendu public en janvier 2006 ; projet de circulaire de novembre 2006. Tout est bon pour chercher à restreindre les critères d’application du dispositif déjà existant. La plupart du temps, et dans l’urgence, Act Up-Paris et les associations de l’ODSE ont réussi à limiter les dégâts. Mais l’interprétation de plus en plus restrictive du droit au séjour des malades étrangèrEs, comme le démantèlement du droit au séjour général, et notamment l’impossibilité d’obtenir dans les faits une carte de séjour de 10 ans, affectent profondément la vie des personnes.
Conséquences sur le terrain
En 2004, une demande sur deux de titre de séjour pour raison médicale aboutissait contre 75 % en 2003. Les derniers chiffres produits par les associations font apparaître un taux d’accord de 42%.
Les conséquences d’un refus de première demande ou de renouvellement pour les personnes sont catastrophiques : impossibilité de trouver un emploi, d’obtenir le RMI ou l’AAH, maintien dans un système de couverture des soins totalement insuffisant (l’AME), logement stable impossible, etc. L’ODSE a publié des témoignages révélateurs. Les recours sont certes possibles, mais exigent un suivi de la part des associations, qui ne bénéficient pas de moyens supplémentaires pour cette surcharge de travail. D’où une profonde inégalité de traitement, entre les personnes qui sont soutenues par les associations, et les autres.
Enfin, depuis janvier 2007, trois personnes gravement malades ont été expulsées dans des pays où elles n’auront pas un accès effectif aux traitements dont elles ont besoin. Si de telles expulsions ne sont pas rares, celles-ci se distinguent par le fait que les médecins de l’administration s’étaient opposé à leur renvoi. Le ministère de l’intérieur, sollicité par les associations pour qu’il fasse appliquer la loi, a décidé de passer en force. Si ces personnes viennent à mourir, Nicolas Sarkozy en sera directement responsable.
De fait, Nicolas Sarkozy utilise les étrangèrEs comme boucs émissaires, sans aucun égard pour les conséquences sanitaires tragiques que sa politique entraîne.
La protection sociale des étrangèrEs sans papier
À cause des socialistes et du gouvernement Jospin, les sans-papièrEs n’ont pas droit à la Couverture médicale universelle (CMU). Ils et elles doivent se contenter d’une sous-protection, l’Aide Médicale d’Etat (l’AME). Depuis 5 ans, la droite n’a eu de cesse de s’attaquer à ce dispositif, Nicolas Sarkozy estime que c’est encore insuffisant.
Positions publiques et décisions
Comme ministre de l’intérieur, puis ministre des finances, il a accompagné de loin ce démantèlement, piloté par des parlementaires proches de lui, mais aussi par le ministère des affaires sociales. Depuis deux ans, il a multiplié les prises de position sur les « fraudes » et les « abus » du système qu’il appelle une nouvelle fois à réformer.
Le 30 juin 2005, il affirmait ainsi au Figaro : « Aujourd’hui, un étranger en situation irrégulière a plus de droits aux soins gratuits qu’un smicard qui paie ses cotisations ». Dans une conférence de presse du 11 janvier 2007, il prétendait : « [...] nous ne devons pas différer indéfiniment la réforme de l’aide médicale d’Etat. Il faut la réserver aux ressortissants étrangers vraiment nécessiteux. Il me paraîtrait tout à fait normal que les autres participent financièrement aux soins qui leur sont dispensés. ».
Or, l’AME est soumis à des conditions de ressources. Les étrangèrEs en situation irrégulière qui dépassent ce plafond ne peuvent disposer d’aucune prise en charge et doivent payer la totalité des frais des soins qui leur sont dispensés. Ce que Nicolas Sarkozy souhaite voir advenir existe donc déjà. De plus, comparer une situation administrative (sans papier) à une situation financière (smicard) est tout simplement aberrant. Ministre des finances, Nicolas Sarkozy avait toute latitude pour revaloriser le SMIC. Mais il préfère stigmatiser les étrangèrEs avec cette comparaison grotesque, fruit de la rhétorique lepéniste.
Ces déclarations le prouvent : soit Nicolas Sarkozy ne sait pas de quoi il parle ; soit il stigmatise sciemment les bénéficiaires de l’AME, ce qui fait de lui un démagogue xénophobe.
Conséquences sur le terrain
À la fin du premier semestre 2005, selon les propres chiffres du ministère de l’intérieur, il y avait entre 200 000 et 400 000 sans-papièrEs en France, et seulement 148 000 bénéficiaires de l’AME. Ce sont donc entre 52 000 et 252 000 personnes qui n’avaient pas de protection sociale. Comment Nicolas Sarkozy ose-t-il parler d’un détournement de l’AME (cf. Le Figaro), alors que le véritable scandale, c’est que des dizaines de milliers de personnes n’ont pas accès aux soins ?
La mise en place des nouvelles dispositions sur l’AME a eu pour effet une baisse du nombre de bénéficiaire du dispositif, notamment pour l’année 2004 et début 2005 ; puis une nouvelle augmentation à partir de la fin 2005. Cette évolution montre que les conditions restrictives d’accès à l’AME n’ont pas fait sortir de prétenduEs fraudeurSEs, mais retardent encore plus l’entrée dans le dispositif.
Cela a des conséquences dramatiques sur les vies des personnes et sur la santé publique. La restriction de l’AME, ses difficultés d’accès obligent les personnes à ne recourir au système de soins que pour les problèmes les plus graves. La prévention et le dépistage du sida sont rendus impossibles ou retardés.
Si aucune donnée n’existe en France sur le retard au dépistage chez les sans-papièrEs, il est possible de s’en faire une idée à partir des données fournies par l’Institut national de Veille Sanitaire (InVS). Parmi les personnes françaises chez qui l’on a diagnostiqué un sida, donc une phase très avancée de l’infection à VIH, 1/3 d’entre elles ignoraient leur séropositivité, ce qui est déjà une proportion importante ; chez les ressortissantEs d’Afrique sub-saharienne, cette proportion est d’environ 2/3.
Ces données ont amené les expertEs chargéEs par le ministère de la santé d’établir les recommandations pour la prise en charge du sida et à demander, comme nous, l’intégration des sans-papièrEs à la CMU. Ce qui sera impossible si Nicolas Sarkozy est élu.
Prostitution
L’application de la loi sur la Sécurité intérieure précarise les prostituéEs, les expose à encore plus de violences, les éloigne des structures de prévention et de dépistage, et bloque le travail des associations.
Positions publiques et décisions
Officiellement, Nicolas Sarkozy prétend vouloir protéger les prostituéEs et démanteler les réseaux de proxénètes. Mais son but est avant tout de répondre aux demandes des riverainEs de lieux de prostitution et de « nettoyer » les lieux, comme si les prostituéEs étaient des déchets.
Dès le lendemain de sa nomination comme ministre de l’intérieur, en mai 2002, Nicolas Sarkozy s’affiche au cours d’une descente de police sur un lieu de prostitution de la périphérie parisienne. Le ton est donné : de nombreuses villes, dont des mairies socialistes, anticipent les mesures légales que le ministre de l’intérieur entend prendre et rédigent des arrêtés municipaux contre les prostituéEs .
Le terrain est donc déjà prêt quand la loi n°2003-239 du 18 mars 2003, sur la Sécurité intérieure, dite LSI, est proclamée. Le chapitre 8 du texte prévoit la mise en place d’un nouveau délit, le racolage, volontairement flou, passible de deux mois de prison et de 3 750 euros d’amende. Le texte exerce par ailleurs un véritable chantage sur les prostituéEs sans-papiers, à qui l’on promet un titre de séjour si elles et ils dénoncent unE éventuelLE proxénète. Pour la première fois depuis le régime de Vichy, l’octroi d’un droit est conditionné à de la délation.
Cela n’est pas suffisant pour Nicolas Sarkozy. Le 26 septembre 2003, alors qu’il a réuni les préfetEs, il affirme : « Il faut donc être décomplexé et agir beaucoup plus vigoureusement. » ; « Outre la procédure judiciaire, continue-t-il, la loi ouvre une procédure administrative qui permet au préfet de retirer aux prostituées étrangères leur carte de séjour temporaire et de les reconduire à la frontière, et cela indépendamment des éventuelles poursuites judiciaires. ». Cela est clarifié dans une circulaire datée du 22 octobre 2003 : « s’agissant du racolage, même dans l’hypothèse où il y aurait une procédure [judiciaire] en cours, [le ministre] demande [aux préfets] de poursuivre l’éloignement jusqu’à son terme ». Bref, Nicolas Sarkozy demande de court-circuiter la procédure judiciaire en cours et d’expulser les personnes avant qu’elles n’aient pu se défendre devant un juge, avec unE avocatE. Pourquoi s’encombrer de droits superflus ?
Un tel dispositif était suffisamment répressif. Nicolas Sarkozy n’a guère eu besoin ensuite de le consolider. Tout juste s’est-il contenté de quelques prises de position publiques sur le sujet, se félicitant de la lutte contre les réseaux. La réalité de terrain est tout autre
Conséquences sur le terrain
Arrestations
En matière d’arrestation, les chiffres sont affolants, dès les premiers jours de l’application de la loi. À Paris, 103 dossiers étaient instruits au 21 mai 2003 ; 15 personnes étaient déjà reconduites à la frontière, et 26 sous le coup d’un arrêté de reconduite.
En novembre 2004, l’association toulousaine Grisélidis lance une pétition et indique dans son communiqué que dans la nuit du 23 au 24 novembre 2004, 34 femmes ont été arrêtées. Le suivi juridique et administratif occupe tout le temps des salariéEs de l’association, au détriment d’autres activités essentielles. Elle rappelle que son « travail de prévention ne peut résister à toute cette violence institutionnalisée, à l’insécurité physique et psychique, à la clandestinité, à l’humiliation et à la dévalorisation de soi, incompatibles avec le souci de protection de soi et des autres, et avec un projet de vie. Comment ne pas constater depuis deux ans les conséquences désastreuses de ces persécutions ? ».
En 2006, l’association Cabiria fait les comptes à Lyon : trois ans après, il y a eu 400 arrestations de prostituéEs par an dans la ville. Mais en 2005, on n’a compté que 224 procès . Qu’est-il arrivé aux personnes arrêtées, mais non jugées, et notamment les sans-papièrEs ?
Conséquences sanitaires
Le flou de la définition du délit de racolage autorise tous les abus. Au cours de rafles, des personnes se voient confisquer leurs préservatifs ; d’autres sont arrêtées parce qu’elles ont des capotes sur elles. Grâce à Nicolas Sarkozy, un outil de prévention devient une bonne raison pour arrêter une personne. Comment, dès lors, se protéger et protéger ses clients ?
Des forces de l’ordre attendent des prostituéEs à la sortie des bus de prévention, dont le travail est ainsi invalidé. Le blanc-seing accordé aux forces de l’ordre autorise toutes les violences, tous les chantages : obligation de faire le ménage gratuitement dans le commissariat, viol en réunion, etc.
Le harcèlement policier oblige les prostituéEs à travailler ailleurs : dans des lieux plus éloignés, par internet, en intérieur (salons, sex-shops, etc.) : autant de lieux où elles n’auront plus accès aux services fournis par les associations, et où elles seront encore plus exposées à des violences.
Nicolas Sarkozy est directement responsable de la catastrophe sanitaire qui touche les prostituéEs et leurs clients.
Usages de drogues et réduction des risques
Alors que la réduction des risques a progressivement trouvé une reconnaissance institutionnelle, et montré tout son intérêt en matière de santé et de droits des personnes, le ministre de l’intérieur n’a eu de cesse de la menacer par une politique sécuritaire particulièrement retorse et des positions sur les drogues aberrantes et dangereuses.
Positions publiques et décisions
Dès son arrivée, il créait les GIR (Groupes d’intervention régionaux) qui devront s’attaquer à l’économie parallèle. Au lendemain de sa nomination en juin 2002, il s’affiche devant les caméras aux côtés de forces de l’ordre intervenant sur un lieu de consommation de drogues.
Ce geste symbolique sera relayé par de nombreuses déclarations va-t-en guerre. Le 24 avril 2003, par exemple, devant le Sénat, il proposait que soit confié les actions de prévention de l’usage de drogues aux forces de l’ordre, et non plus au tissu associatif, stigmatisant « l’épidémie de consommation » et appelant à « plus de sévérité à l’égard des consommateurs ».
Ainsi, Nicolas Sarkozy n’a pas besoin de renforcer l’arsenal juridique et réglementaire réprimant l’usage de drogue. Ses déclarations suffisent à renforcer une culture du résultat dénoncé par les policièrEs même, comme en témoigne cette réaction d’un policier lyonnais spécialisé dans les stups : « T’attrapes le premier gamin par les pieds, tu le secoues et les bouts de chichon tombent. Tu l’embarques pour un gramme, ça te fait une procédure et une affaire résolue » [2]. On comprend comment le ministre peut ensuite agiter le chiffre d’une consommation en hausse.
Enfin, Nicolas Sarkozy refuse tout débat sur la question des drogues, tout point de vue qui prendrait en compte le plaisir des usagerEs, les recherches scientifiques ou l’intérêt de la santé publique. En juin 2006, il stigmatisait ceux qui présentent l’usage de drogues comme une liberté, thèse qui révèle selon lui le « conformisme de la pensée, la lâcheté du comportement qui va finir par devenir de la complicité ». « Assimiler le vin ou le tabac à la drogue est une erreur », déclare-t-il par exemple le 28 févier dernier. Inversement, il s’est récemment dit prêt à légaliser la publicité sur le vin « produit du terroir », qu’il ne faudrait pas « stigmatiser ».
Conséquences sur le terrain
En 2001, il y a eu 71 667 interpellations pour Infraction à la Législation sur les Stupéfiants. Ce chiffre est passé à 101 047 en 2005. Ce nombre s’est certes stabilisé entre 2004 et 2005, et il ne nous renseigne pas sur les procédures judiciaires éventuelles qui ont pu en découler. Mais il témoigne d’une réelle volonté de harceler les usagèrEs de drogues, dénoncée par l’ensemble des acteurs et actrices de terrain.
La volonté de faire du chiffre incite en effet les forces de l’ordre à intervenir dans des lieux de consommation connus, où peuvent intervenir des associations, et près des structures d’accueil des usagèrEs de drogue. L’activité policière représente donc un frein réel au travail de prévention, de réduction des risques, d’aide et de soutien aux personnes. ChacunE a pu constater, par exemple, la baisse de consommation de seringues propres induites par la présence policière.
Ainsi, les avantages pratiques de la réduction des risques et son inscription dans la loi sont contrebalancés par une répression croissante.
Prison
La politique répressive de Nicolas Sarkozy et sa volonté de contrôle total du pouvoir judiciaire ont eu des conséquences directes sur la situation des détenuEs, notamment la situation sanitaire, et cela bien qu’il n’est pas été en charge de la justice. La prison est, pour lui, la seule réponse à tous les problèmes de société. Peu importe que les conditions de détention soient totalement indignes ou que l’incarcération soit incompatible avec la santé.
Positions publiques et décisions
Le 22 janvier 2007, Nicolas Sarkozy visite la prison pour femmes de Rennes. Il s’émeut alors des conditions d’incarcération et affirme qu’il y a « clairement un problème essentiel qui est celui de la présence dans les prisons de malades, il faut de toute urgence développer ce qu’on peut appeler l’hôpital-prison ». Or, les malades en prison devraient relever de la suspension de peine, cette mesure adoptée dans le cadre de la loi sur le droit des malades de 2002, et rendue célèbre par son premier bénéficiaire, Maurice Papon. L’oubli de cette disposition est révélateur de l’incapacité de Nicolas Sarkozy à promouvoir une loi quand elle évite aux personnes la prison. Le ministre de l’intérieur a toujours critiqué les mesures qui permettaient aux détenuEs de quitter l’incarcération.
Il y a beaucoup d’hypocrisie à s’émouvoir des conditions de détention quand on a passé 5 années de sa vie à créer de nouveaux délits [3] et à afficher une fermeté répressive à l’égard des étrangèrEs, des usagèrEs de drogues, des prostituéEs, des précaires, des contestataires - sans se soucier de leur état de santé. La répression carcérale est construite comme seul horizon au point d’avoir besoin ensuite d’un sous-ministère au programme immobilier de la justice.
Nicolas Sarkozy a passé 5 ans à court-circuiter la justice, à discréditer les juges et à les soumettre à la pression de l’opinion publique en stigmatisant leur supposé laxisme. Le 8 juin 2006, par exemple, il affirmait à propos des émeutes de l’automne 2005 : « Je n’ai pas trouvé admissible que (...) le tribunal pour enfants de Bobigny n’ait pas prononcé une seule décision d’emprisonnement. ». Peu importe que l’accusation soit fausse. Ce qui compte c’est de soumettre les juges à plus de pression pour qu’ils et elles aillent dans le sens de l’enfermement : stratégie particulièrement efficace auprès des juges d’application des peines (JAP), qui, entre autres tâches, ont à décider d’une suspension de peine.
Conséquences sur le terrain
Nicolas Sarkozy n’est pas le seul responsable de toute l’horreur carcérale. En matière de droit des malades, les ministres successifs de la santé et de la justice sont les premièrEs à avoir des comptes à rendre. Il n’en reste pas moins vrai que le rôle répressif de l’ancien ministre de l’intérieur a été déterminant dans la situation actuelle des prisons et la place qu’elles occupent dans notre société :
Une forte augmentation de la population carcérale dès la première année de mandat, avec une stabilisation ensuite : on passe de 56 385 détenuEs au 1er juillet 2002 à 60 963 au 1er juillet 2003 puis 60 925 en 2005.
Parallèlement le nombre de places augmente : 47 473 place au 1er juillet 2002, contre 51 312 au 1er juillet 2005. La logique est donc la suivante : on créée de nouveaux délits pour créer de nouvelles places de prison. On notera au passage que la surpopulation carcérale reste la règle. La création de nouvelles places de prison ne vise donc pas à « humaniser » les conditions de détention, mais bien à prolonger une politique répressive érigée en unique règle de société.
Le nombre d’entrantEs en prison chaque année ne cesse d’augmenter, signe que de plus en plus de personnes font, ou refont, l’expérience de la prison : 64 730 entrantEs et 63 132 sortantEs en 2001 ; 76 837 et 69 382 en 2002 ; 84 710 et 84 759 en 2004 ; 85 536 et 85 215 en 2005.
En 2006, 113 personnes en détention ont fait une demande de suspension de peine. Seulement 49 ont été accordées. Entre 120 et 130 personnes meurent chaque année en prison, en dehors des suicides [4].
« Avec les lois Perben et Sarkozy, les juges, poussés par ce qui apparaît la volonté générale, n’attendent plus de se trouver dans des circonstances exceptionnelles pour placer en détention. Ils choisissent d’autant plus volontiers l’incarcération qu’ils savent que les alternatives à l’emprisonnement ont été sacrifiées. (...) Dans cette affaire, la responsabilité politique est engagée. Les dirigeants qui, au mépris du respect dû à la personne humaine, entassent en pleine connaissance de cause des personnes vulnérables dans des lieux où les conditions de vie sont indécentes auront à en répondre moralement, politiquement et, il faut l’espérer, légalement. »
Ce texte, extrait de la préface du rapport de l’Observatoire International des Prisons (OIP) date de 2003. Il est malheureusement plus que d’actualité. La réalité carcérale d’aujourd’hui, son mépris pour les malades et les minorités, nous donnent une idée précise de ce qui nous attend si Nicolas Sarkozy est élu à la Présidence de la République.
Droits des LGBT (Lesbienne Gay Bi Trans’)
Nicolas Sarkozy essaie de masquer son homophobie et sa transphobie. Mais son bilan le trahit. Les timides progrès envers les homosexuelLEs sont contrebalancés par une indifférence totale envers les trans, le refus d’assurer l’ égalité des droits entre homos et hétéros et une lâcheté complice envers Christian Vanneste, et les auteurEs de propos haineux dont il s’est entouré.
Un bilan qui cautionne les inégalités et les discriminations
Le 29 septembre 2004, dans le cadre des discussions parlementaires sur le budget 2005, Nicolas Sarkozy, alors ministre des finances, annonce les mesures fiscales visant à améliorer le PaCS, dont la suppression du délai de 3 ans pour que les couples pacsés puissent bénéficier d’une déclaration commune. Mais il ne va pas jusqu’au bout de cette logique : la fiscalité sur la succession reste inchangée, sanctionnant encore l’infériorité des couples homosexuels, qui ne peuvent prétendre qu’au PaCS.
Dès lors, les améliorations apportées à cette époque n’expriment pas une volonté réelle d’en finir avec les inégalités ; elles sont surtout destinées à faire taire les critiques contre le PaCS sur lesquelles s’appuient les revendications des associations LGBT en faveur du mariage ou de l’adoption. C’est en effet ce même jour que Nicolas Sarkozy rappelle qu’il n’est « pas favorable au mariage des homosexuels, parce que le mariage est une institution pour les enfants et que je ne suis pas favorable à l’adoption ». Pour quelles raisons Nicolas Sarkozy pense-t-il que les homosexuelLEs sont incapables d’élever des enfants - alors que les familles homoparentales existent ? Le ministre ne le dit pas.
Quand on le met face à ses contradictions, il s’énerve : « Je n’accepte pas qu’on me dise homophobe parce que je refuse l’adoption par les couples homosexuels » affirmait le candidat UMP sur TF1 le 5 février 2007. Mais qu’est-ce que l’homophobie, si ce n’est un ensemble de discours et de pratiques qui visent à inférioriser les gays et les lesbiennes ?
Les injures homophobes et transphobes tolérées
C’est donc avec beaucoup de réserves qu’il faut lire le bilan du candidat UMP. Certes la loi sur la Sécurité intérieure a intégré en 2003 l’homophobie comme circonstance aggravante de crimes, mais elle n’a rien prévu pour la transphobie. Certes, la majorité UMP a voté la loi qui crée la Halde et pénalise les injures homophobes. Mais, d’une part les trans’ sont oubliéEs de ces avancées, malgré les revendications associatives ; et d’autre part, Nicolas Sarkozy s’est très peu investi dans ce combat. Le président de l’UMP refuse de tirer les leçons de la pénalisation des injures homophobes en excluant Christian Vanneste, condamné en appel le 25 janvier 2007, et en le laissant se présenter sous l’étiquette UMP aux législatives. Il vide ainsi la loi de toute sa substance en tolérant de tels propos. Mais quoi d’étonnant de la part du responsable d’un parti qui n’a jamais cru bon de s’excuser pour les propos de parlementaires comme Pierre Lellouche ou Christine Boutin, et qui a même jugé bon de s’en entourer pour sa campagne ?
programme homophobe et transphobe
Depuis le printemps 2004, tous les partis de gauche sont favorables à l’ouverture du mariage et de l’adoption pour les couples de gays et de lesbiennes, ainsi que l’insémination artificielle pour ces dernières. Depuis l’hiver 2006, tous les partis de gauche sont favorables à la dépsychiatrisation des trans’ et un changement d’état civil facilité.
Le programme de Nicolas Sarkozy refuse aux couples homosexuels le mariage et l’adoption, aux couples de lesbiennes l’insémination artificielle. Il n’évoque même pas les réalités des personnes transgenres.
Il n’y a pas à discuter : Nicolas Sarkozy est homophobe et transphobe.
Solidarité nationale et internationale
Comme pour toute guerre, le nerf de la lutte contre le sida est l’argent. La répartition des richesses, notamment auprès des plus malades, et les moyens accordés au combat contre la pandémie sont des éléments déterminants. La politique ouvertement libérale, égoïste et clientéliste de Nicolas Sarkozy est totalement contraire à l’intérêt des malades, en France et dans le monde.
En France
Ministre des finances, Nicolas Sarkozy a co-piloté la réforme de la Sécurité sociale. C’est notamment lui qui a voulu la mise en place du forfait non remboursable de 1 euro sur chaque consultation médicale, qui est un véritable impôt sur l’état de santé : plus vous êtes malade, plus vous avez besoin de voir votre médecin, plus vous devez payer. « Responsabiliser » les patientEs, pour Nicolas Sarkozy, c’est donc les faire payer, même si elles et ils sont très malades et précaires. Le candidat UMP a d’ailleurs promis de démanteler un peu plus le système solidaire de la Sécurité sociale : « Il faut instaurer une franchise modeste par famille, et pas par individu, sur les premiers euros de dépenses annuelles en consultations médicales ou en examens biologiques. » [5] .
Nicolas Sarkozy veut par ailleurs priver les malades précaires de tout revenu. Lors de son discours d’investiture, le 14 janvier 2007, il déclarait : « Je propose qu’aucun minimum social ne soit accordé sans la contrepartie d’une activité d’intérêt général. » . Ainsi, les personnes qui touchent l’Allocation adulte handicapée, car elles sont incapables de travailler, devraient s’acquitter d’une activité d’intérêt général. Des malades, des handicapésE, réduitEs à la précarité, excluEs du monde du travail devraient rendre des comptes parce qu’ils et elles touchent une toute petite part de la solidarité nationale. Que souhaite Nicolas Sarkozy ? Que les personnes incapables de travailler meurent, afin qu’elles coûtent moins cher à la société ?
Il faut dire que la politique fiscale du candidat UMP n’est pas en faveur des plus précaires : réduction de l’ISF, diminution de l’impôt qui favorise les contribuables les plus riches, discours poujadiste concernant l’impôt sur le revenu, etc. Une telle politique fiscale n’est pas compatible avec des impératifs de solidarité envers les plus précaires et les plus malades. A terme, elle précarise aussi les personnes et les ménages moins modestes.
Dans le monde
Ministre des finances, Nicolas Sarkozy a refusé avec Jacques Chirac que la France, en 2004, tienne ses engagements en matière de contribution internationale à la lutte contre le sida. La politique fiscale et budgétaire qu’il promet pour la France n’est pas de celle qui permette un engagement réel en faveur des pays les plus pauvres.
Nicolas Sarkozy se moque de l’impact du sida dans les pays du Sud. Son programme présidentiel n’annonce rien de concret, tant en matière de financement, que de soutien à ces pays qui auraient recours aux génériques. Lors de ses voyages internationaux, il n’a jamais parlé de la pandémie, qui tue pourtant 10 000 personnes par jour. Son adhésion indéfectible à la politique américaine augure mal du rôle que la France pourrait jouer dans la lutte contre le sida, face à des Etats-Unis qui se sont engagés contre le préservatif et la circulation des génériques.
Conclusion
Le 5 mai 2002, au lendemain des présidentielles qui avaient vu la présence de Le Pen au second tour, nous écrivions : « Act Up-Paris avait appelé à voter Chirac après les résultats du 1er tour. Maintenant qu’il a été élu Président de la République, il se doit et il nous doit d’assurer la sécurité des minorités que nous représentons : les malades, les homosexuels, les étrangers, les usagers de drogues, les femmes, les prostitués. La première façon d’assurer la sécurité de ces minorités, c’est de ne pas nommer Nicolas Sarkozy dans son gouvernement. » .
Le 8 juin 2002, après un mois seulement de Nicolas Sarkozy au ministère de l’intérieur, nous l’affirmions : « La sécurité selon Sarkozy, ce n’est ni plus ni moins que notre insécurité » . Et de rappeler régulièrement qu’avec le ministre de l’intérieur : « Le Pen a gagné les élections » .
Notre affiche de décembre 2005, représentant Nicolas Sarkozy sous le slogan « Votez Le Pen » , n’avait rien de caricatural. Nommé par un gouvernement de droite, soumis à la pression du Front national, Nicolas Sarkozy avait le devoir de s’opposer à l’extrême-droite. Il a préféré appliquer la politique préconisée par Le Pen - notre dossier de presse le démontre aisément : la détérioration de nos conditions de vie, de l’accès aux soins, du dépistage ; la stigmatisation des populations les plus vulnérables ; l’expulsion en masse d’étrangèrEs ; l’incarcération des personnes désignées publiquement comme nuisibles.
Depuis 5 ans, nous n’avons cessé de nous battre, non pour gagner des choses utiles aux malades et à la lutte contre le sida, mais pour éviter d’en perdre. Eviter que des malades se fassent expulser dans des pays où ils et elles ne seront pas soignéEs ; éviter que les droguéEs ou les prostituéEs n’aient plus accès à la prévention, au dépistage, aux soins ou à des droits fondamentaux ; éviter que les plus précaires doivent payer pour leurs soins. Partout, dans tous ces combats, nous avons trouvé Nicolas Sarkozy CONTRE nous. Ses fantasmes répressifs, son incompétence, sa xénophobie, son homophobie, sa transphobie, sa politique fiscale et budgétaire, ses lois sécuritaires, ont été parmi les principaux obstacles à nos combats et à une politique de lutte contre le sida efficace.
La France de Nicolas Sarkozy favorise une classe privilégiée : le mâle, blanc, français, hétérosexuel, en bonne santé, sans handicap, riche, âgé de 30 à 60 ans, qui ne vit pas dans les banlieues. Toutes les autres personnes seront, un jour ou l’autre, touchées par sa politique. A celles et ceux que notre discours indiffère, parce qu’ils et elles n’y voient que la défense de minorités dans lesquelles ils et elles ne se reconnaissent pas, nous le répétons :
Nous avons survécu à 5 ans de Sarkozy,
Nous ne survivrons pas à 5 années supplémentaires.
Et vous non plus
Source : Act Up-Paris