24 décembre 2007

Révolte

Pour une fois, je souscris à un appel du président de la république [mais en raison de l'étroitesse d'esprit dont il fait quotidiennement montre et de la dégradation des valeurs républicaines, je lui refuse les majuscules] demandant aux catholiques français de s'engager davantage dans la société.

Je veux d'abord lui renvoyer son ignorance. Dans ma ville, le maire, PS, est à la messe tous les dimanches. Parmi les conseillers municipaux, PS, il y a notamment le responsable de l'épicerie sociale (qui s'occupe aussi de la préparation au baptême dans la paroisse). Peur-être les valeurs humanistes apportées par le christianismes sont-elles plus difficile à trouver chez des Devedjian, Vanneste, Hortefeux ?

Je veux ensuite lui renvoyer sa situation personnelle, complaisamment étalée dans la presse aux ordres. Alors que tant de divorcés profondément croyants sont blessés par l'interdiction qui leur est faite de communier - même si, heureusement, nombre de clercs ferment les yeux - aller se faire nommer chanoine par le Pape relève au mieux de la débilité profonde, au pire de tares que la charité chrétienne m'ordonne de taire.

Je veux enfin lui dire que si les chrétiens s'engagent encore plus dans la vie publique, ce sera sans nul doute pour rejeter la société fondée sur l'argent et la haine (mépris des pauvres, des anciens, xénophobie, racisme) qu'il défend et établit.

Gloire à Dieu et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté - et mon incroyable optimisme ne me fait pas désespérer qu'il soit un jour touché par la grâce, qu'il reprenne sa première épouse, libère les prisonniers, bloque l'inflation, cesse de vendre des armes aux pays pauvres, et laisse Patrick de Carolis gérer seul Antenne 2.

23 décembre 2007

Au nom de la loi

Grâce à Bakchich, nous avons un aperçu du travail de législateur de nos députés... de quoi ne pas regretter que cela soit fait par une assemblée-croupion...

Femmes, Belges ou conducteurs d'aérotrains : la loi simplifie votre vie

Un courageux collaborateur de Bakchich a pris du temps à la veille des fêtes pour lire les 254 articles de la loi de « simplification du droit ». Inventaire à la Prévert des abrogations législatives

On se demandait pourquoi le gouvernement tarde à mettre en œuvre de vraies réformes. On sait désormais qu’il était occupé jusqu’à présent à des sujets très urgents. Une loi publiée le 20 décembre sous la signature de Nicolas Sarkozy, François Fillon, Jean-Louis Borloo, Michèle Alliot-Marie, Christine Lagarde, Rachida Dati, Eric Woerth et Christian Estrosi, se préoccupe, en 254 articles et sous articles, de la « simplification du droit ». Une lecture attentive montre qu’il était en effet urgent d’intervenir. Le texte confirme l’abrogation des lois ouvrant des crédits pour les années 1880, 1882, 1900, 1905, 1898, 1899, 1909, 1910, 1911, 1922 (dans cet ordre). Restait-il des reliquats non dépensés ? Si c’est le cas, c’est scandaleux : demandons que chaque année une loi confirme que l’année précédente s’est bien terminée à la fin de l’année précédente. Avec l’abrogation de la loi de 1922 « supprimant dans les actes de naissance des enfants naturels les mentions relatives au père ou à la mère lorsque ceux-ci sont inconnus », les mairies se demandent s’il faudra désormais inscrire le nom des parents inconnus dans les actes de naissance. La loi de 1960 « fixant les conditions dans lesquelles les mineurs de fond des mines de combustibles minéraux solides accompliront leurs obligations militaires » est aussi abrogée. Les mères des intéressés sont rassurées, depuis le temps qu’elles se demandaient si leur fils mineur allait partir à la guerre.

La loi de 1851 sur « les ventes publiques, volontaires, de fruits et de récoltes pendants par racines » est abrogée (enfin !), mais qu’en est-il du régime des ventes involontaires de fruits pendant par les racines ? La loi de 1905 « supprimant l’autorisation nécessaire aux communes pour ester en justice » étant aussi supprimée, la suppression de la suppression vaut-elle restauration ? Et est-ce lié aux prochaines municipales ? Mystère. De même, la loi du 28 décembre 1904 « portant abrogation des lois conférant aux fabriques des églises et aux consistoires le monopole des inhumations » est supprimée. Les fabriques des églises retrouvent-elles ainsi le monopole des inhumations ? Ce serait un geste bienvenu d’un Chanoine envers son Pape. De nombreuses lois concernant les femmes, les Belges, les aérotrains ou encore les « camions-bazars » sont aussi supprimées, ce qui est bizarre, quand on sait que les Belges ne sont pas électeurs et que les conducteurs d’aérotrains ne sont pas spécialement de droite. La loi confirme en outre que le tribunal de cassation, disparu depuis deux siècles, n’existe plus - sans doute une idée de Rachida Dati. Au passage, la loi de 1945 nationalisant les usines Renault est aussi abrogée, de même que la loi instituant le Conseil national du travail (la concertation avec les travailleurs mérite bien une petite simplification du droit). Mais il est vrai que la nouvelle loi comporte aussi des dispositions utiles, par exemple pour savoir que faire en cas de « vacance de poste du président du tribunal de première instance de Mata-Utu ».

Précisons enfin que l’article 27-II-22 de ce texte confirme l’abrogation de la loi de 1935 tendant à la répression des fraudes sur le guignolet. Rien n’est dit sur le guignolet-kirsch ni sur le picon-bière. Heureusement, l’article 30-IX-1 précise que la loi est applicable dans les Terres australes et antarctiques. Moralité : comme disent les Inuits, « si tu acceptes d’être pris pour un pingouin, ne t’étonne pas d’être gouverné par des manchots ».

Joyeux Noël !

22 décembre 2007

Caporal

Chez vive le feu, un texte d'Alain Badiou pour résumer l'année 2007...
"Il y a en France une tradition particulière qui est l'exact symétrique de la France universelle des Lumières et des droits de l'homme. Face à la Révolution de 1789, aux mouvements ouvriers du XIXe siècle, au Front populaire, à la Résistance et à Mai 68, il existe un autre courant, droitier et conservateur, qui combine un certain nombre de traits. Ses aspects sont connus: présenter comme révolutionnaire une politique réactionnaire; valoriser les modèles étrangers en laissant croire que la France est en retard; désigner une minorité comme suspecte et proposer son contrôle et sa répression de manière énergique; enfin, montrer dans le passé un événement mauvais avec lequel il faut en finir. Mai 68 dans le cas de Sarkozy, le Front populaire pour Pétain. Cette tradition remonte en réalité à 1815, au moment où ceux qui avaient fui le pays à la Révolution sont revenus avec l'idée de la Contre-Révolution. Il existe depuis dans notre pays un conservatisme particulier qui apparaît régulièrement dans les moments de changements qui inquiètent. (...) J'appelle "pétainisme" ce courant dont le lien avec le sarkozysme est à mes yeux évident. (C'est un peu provocateur) et c'est voulu ainsi. Sarkozy est aussi l'homme d'une minorité revancharde qui instrumentalise la peur pour son intérêt. On a des indices de cette revanche: une droite enfin décomplexée clamant que c'est très bien d'être riche et considérant que ce qu'il y a à dire aux pauvres, c'est qu'ils travaillent plus pour l'être moins".
Pétainiste, certes, mais avec un maniérisme tout proche du défunt Ceaucescu, dont le nom signifiait petit caporal...

18 décembre 2007

Je chante et puis j'oublie...

Tout le monde est une drôle de personne,
Et tout le monde a l'âme emmêlée,
Tout le monde a de l'enfance qui ronronne,
Au fond d'une poche oubliée,
Tout le monde a des restes de rêves,
Et des coins de vie dévastés,
Tout le monde a cherché quelque chose un jour,
Mais tout le monde ne l'a pas trouvé,
Mais tout le monde ne l'a pas trouvé.

Il faudrait que tout le monde réclame auprès des autorités,
Une loi contre toute notre solitude,
Que personne ne soit oublié,
Et que personne ne soit oublié

Tout le monde a une seule vie qui passe,
Mais tout le monde ne s'en souvient pas,
J'en vois qui la plient et même qui la cassent,
Et j'en vois qui ne la voient même pas,
Et j'en vois qui ne la voient même pas.

Il faudrait que tout le monde réclame auprès des autorités,
Une loi contre toute notre indifférence,
Que personne ne soit oublié,
Et que personne ne soit oublié.

Tout le monde est une drôle de personne,
Et tout le monde a une âme emmêlée,
Tout le monde a de l'enfance qui résonne,
Au fond d'une heure oubliée,
Au fond d'une heure oubliée.

14 décembre 2007

J'accuse !

Ce matin je suis en colère. Le New Jersey vient d'abolir la peine de mort, la France de la rétablir en condamnant à perpétuité un homme de mon âge pour un meurtre qu'il n'a probablement pas commis. Yvan Colonna est la victime du racisme anti-corse dont de nombreux amis corses m'ont déjà apporté le témoignage, et d'un système judiciaire dépendant d'un complexe politico-mafieux qui a occulté les réelles responsabilités.

Je pense à Yvan, je pense à sa famille, je pense aussi à la famille de Claude Erignac, qui ne parviendra jamais à faire son deuil au nom d'une prétendue raison d'Etat anti-terroriste.


Mise à jour.
14 décembre après-midi, je prends le bus 174 à la Défense. 3 individus s'installent derrière moi et commencent à discuter. "enfin Colonna a pris perpète, c'est très bien comme ça". J'ai envie de me retourner et de les avoiner... Ils descendent à Levallois, je me rappelle soudain avoir lu récemment que c'était là le nouveau siège des renseignements généraux. Vous savez, la gestapo de notre petit führer...

12 décembre 2007

Droits de l'homme et de la femme

Oui, j'ai apprécié ce qu'a déclaré le leader fasciste Kadhafi à Paris :
"Avant de parler des droits de l'homme, il faut vérifier que les immigrés bénéficient chez vous de ces droits", a déclaré Mouammar Kadhafi, selon la traduction en français de son discours prononcé en arabe.

"Nous sommes dans le pays qui parle des droits de l'Homme. Y-a-t-il certains de vos droits qui ne sont pas appliqués?", a demandé le dirigeant libyen, en s'adressant à ses "frères africains immigrés" présents dans le grand amphithéâtre du siège de l'Unesco, qui l'ont vivement applaudi.
"Nous sommes l'objet d'injustices. Notre continent a été colonisé, nous avons été réduits en esclavage, déplacés dans des navires comme du bétail. Aujourd'hui nous travaillons dans le bâtiment, dans la construction de routes (...). Après tout cela, nous sommes envoyés dans les banlieues et nos droits sont violés par les forces de police", a ajouté le colonel Kadhafi.

"Les Africains immigrés sont considérés comme des marginaux, des nécessiteux. Ils expriment leur colère parfois par la violence, allument des incendies", a-t-il ajouté, dans une apparente allusion aux violences dans les banlieues en France.
"Je réprouve la violence, mais ceux qui expriment leur mécontentement vivent des situations difficiles en Europe, cela mérite qu'on y réfléchisse", a-t-il ajouté. (source)
Prends ça, Jean-Marie Sarkozy !

J'ai aussi découvert le blog culture et politique arabe, qui nous apprend qu'un religieux a déclaré que si elle n'avait pas d'autre solution, la femme devait répondre à la violence conjugale par la violence... voilà qui ne fait pas avancer les choses, mais quand même...

7 décembre 2007

Représentativité

Une fois n'est pas coutume, un article de l'Humanité, qui rappelle que le MEDEF, Mme Parisot, ne représente pas grand monde dans le patronat, et n'est donc pas légitime pour exiger la destruction du Code du travail en cours au Parlement.

Le patronat vampirise l'argent public

Révélations . Représentativité quasi nulle, utilisation détournée de fonds publics, inefficacité économique… Une cadre raconte son travail au quotidien dans une fédération patronale.

« Caisse noire » de l’UIMM abondée à l’origine pour casser les grèves et désormais utilisée en bonne partie, semble-t-il, pour arrondir les fins de mois de ses dirigeants et de leurs amis, détournement des moyens de la médecine du travail ou encore de la formation professionnelle au bénéfice des certaines instances patronales…

Englués dans les révélations sur leurs petits arrangements entre amis, le MEDEF, ses fédérations professionnelles et leurs organisations territoriales connaissent une saison difficile… Malgré la lenteur de l’institution judiciaire qui a paru hésiter, deux mois durant, avant d’ouvrir hier, enfin, une information judiciaire sur les retraits suspects à l’UIMM. Et en dépit de la « bonne volonté » bienséante de nombreux médias alléchés, au début, à l’idée de pister les « syndicalistes corrompus » par les fonds secrets du patronat, mais un brin dépités après avoir fait chou blanc…

Après la publication, la semaine dernière, d’un très sévère rapport de la Cour des comptes fustigeant l’inefficacité et l’absence de contrôle des aides des collectivités territoriales versées aux entreprises et aux chambres de commerce (lire page 4), l’Humanité livre aujourd’hui une nouvelle pièce accablante au débat public : comment, dans le patronat, les hérauts du libéralisme le plus échevelé utilisent-ils, sous couvert de « développement économique », des fonds publics pour financer leur fonctionnement et nourrir en fait leurs nébuleuses d’organisations. Dans un monde où la loi du silence règne plus que jamais, nous avons recueilli un témoignage qui vient de l’intérieur. Une ex-cadre d’une fédération professionnelle raconte quelques années de travail dans les méandres du patronat : indifférence face à l’absence totale de représentativité, utilisation abusive de fonds publics, déficit absolu de contrôle démocratique, inefficacité économique, etc. « On m’a laissé courir dans le seul but d’obtenir non pas des résultats, mais des subventions », constate-t-elle. Révélations sur un système opaque, mais au fonctionnement si ordinaire.

T. L.

Quand elle découvre, lors d’un énième entretien d’embauche, que son interlocuteur, « vêtu comme une gravure de mode, soixantaine élégante, manières courtoises » et jusque-là protégé par le flou artistique des annonces, représente en fait une fédération patronale, la jeune sociologue, multidiplômée mais au chômage, tombe de sa chaise : non, tout mais pas ça, jamais elle ne travaillera pour les fumeurs de cigares au volant des grosses cylindrées, debout les damnés de la Terre… Elle reste quand même, provoque un brin et prend le parti d’en rire. Au bout du compte, malgré ses piques, même réitérées au deuxième entretien, et « pour je ne sais quelles obscures raisons », insiste-t-elle, elle sera embauchée. À l’automne 1996, Héloïse (1) devient déléguée régionale d’une fédération patronale représentant une cinquantaine de syndicats professionnels et qui compte dans l’Union des industries et des métiers de la métallurgie (UIMM), au Groupe des fédérations industrielles (GFI) et au MEDEF.

Bien sûr, elle a du mal, au début : à l’occasion d’une réunion de l’Association des moyennes entreprises patrimoniales (ASMEP), fondée et présidée par Yvon Gattaz, l’exaltation frénétique des vertus, par exemple, du « licencier sans entrave » la révolte… Mais petit à petit elle apprend à construire, comme elle dit, l’équation « moi + représentants patronaux = nous », avec la conviction sincère de la nécessité d’une « alliance des producteurs, incluant les forces vives du salariat et du patronat en vue d’une modernisation démocratique de l’économie et de la société française ».

les PME intéressent peu les organisations patronales

Dans la grande région dont elle a la charge, Héloïse est censée représenter la fédération, les syndicats adhérents et les chefs d’entreprises auprès des collectivités territoriales, notamment afin d’obtenir des subventions publiques pour financer des actions de développement économique. Dans un premier temps, après avoir constaté que 6 % seulement des 2 000 entreprises du secteur implantées dans sa région sont affiliées à la fédération, elle part à la rencontre des industriels, histoire de « connaître ses mandants » et, le cas échéant, de les faire adhérer. « Je voulais mieux connaître le tissu industriel de la région, raconte-t-elle aujourd’hui. Cela me paraissait une priorité : il fallait aller dans les entreprises pour savoir au nom de qui j’allais parler. C’est comme ça, me semblait-il, qu’on pouvait construire notre propre représentativité. Un représentant qui ne connaît pas ses mandants n’est pas représentant. Malgré quelques adhésions prometteuses, on m’a vite expliqué, à la fédération, que les cotisations étaient perçues par les syndicats et non par la fédération, et que, par conséquent, je devais arrêter. » Héloïse élargit le propos. « On parle souvent de l’absence de représentativité des syndicats de salariés, mais jamais de l’absence de représentativité des syndicats de patrons. Or, elle est aussi faible. Elle est calculée par rapport au chiffre d’affaires d’un secteur. Dans ces conditions, les organisations patronales ne sont pas intéressées par les petites et moyennes entreprises. Elles disent : "Nous ne sommes pas un service public, notre mode de financement ne nous permet pas de travailler pour tout le monde !" Les organisations patronales sont des ploutocraties qui paient un bon repas aux chefs d’entreprise histoire de leur faire croire qu’ils sont importants, mais les renvoient bien vite jouer dans leurs boîtes. Les choses sérieuses se passent sans eux. »

brutale mise sur la touche après un congé maternité

Dans le même temps, Héloïse découvre la nébuleuse patronale : fédération et syndicats, mais aussi centre d’études techniques, filiale d’investissement, organismes de formation, structure commerciale de promotion des industries du secteur ou encore « associations de projet », comme celle qui gère une manne de 6 millions d’euros décrochée pour servir à la reconversion des industries liées à l’armement dans sa région et dont Héloïse sera écartée après un congé maternité. « Je n’allais pas me laisser pot-de-fleuriser », lance-t-elle. Elle profite de cette brutale mise sur la touche pour se concentrer sur un projet de site Internet pour les entreprises ressortissant de la fédération, financé par des fonds émanant du ministère de - l’Économie et des Finances. « Il s’agissait de stabiliser et fédérer les multiples structures de ce secteur industriel qui entretenaient entre elles des relations souvent conflictuelles, se souvient-t-elle, en rassemblant dans un portail mutualisé un annuaire des entreprises et de leurs offres, des actualités sur le secteur, une "bourse aux affaires" qui devait permettre aux industriels, souvent âgés, de céder ou transmettre leurs entreprises dans de meilleures conditions, et d’autres services encore destinés à accroître l’attractivité de nos industries. À la fin des années 1990, ce projet très innovant avait été cité par le président de la fédération sur LCI et était considéré au ministère de l’Industrie comme une préfiguration de "l’organisation professionnelle de demain". Après une centaine de réunions, j’avais réussi à convaincre les syndicats professionnels de laisser un peu de côté leur sacro-sainte souveraineté pour mutualiser les informations sur leurs adhérents et les développements informatiques. Les perspectives s’annonçaient prometteuses. »

après le harcèlement, licenciement « pour faute grave » en 2001

Sous l’impulsion décisive d’Héloïse, la fédération patronale reçoit de l’État une première subvention de 430 000 euros pour financer le portail. Deux ans plus tard, le ministère en ajoute une deuxième de 280 000 euros pour financer, sur la base des développements réalisés, le système d’information et d’aide à la décision permettant à la fédération d’optimiser ses processus métiers, de piloter son activité et d’offrir d’autres services destinés à améliorer la productivité des entreprises du secteur. « La contrepartie de ces subventions publiques était que les développements soient pérennes et l’association gérant le projet soit viable économiquement, complète la jeune femme. Mais au long du projet, tout a été fait pour saboter le processus décisionnel, il fallait que l’association ne rapporte jamais d’argent. J’ai dû me battre pour que les fonds publics soient uniquement destinés aux investissements et non aux frais de fonctionnement, lorsque j’ai découvert par hasard que la fédération appliquait ses tarifs les plus élevés pour la location du matériel ou la reprographie. Les organisations professionnelles sont peuplées de grands libéraux qui ne financent leurs projets que sur fonds publics et qui s’empressent de les utiliser pour payer les frais de fonctionnement. Si prompts à réclamer toujours plus d’exonérations, ils se comportent comme des rapaces dès qu’ils sont en situation de taxer… Le secrétaire général m’a dit un jour que, si les syndicats disparaissaient, ça ne le dérangerait pas, car cela lui permettrait de louer les bureaux au prix du marché et de gagner plus d’argent. C’est dire le haut sens de l’intérêt général des entreprises et des syndicats qui règne dans cette fédération - patronale… »

Après une série de péripéties plus malheureuses les unes que les autres, qu’elle qualifie de « cas d’école de harcèlement », Héloïse est licenciée « pour faute grave » en 2001 : exaspérée de voir son patient travail piétiné une fois de plus, elle n’a pas pu s’empêcher d’envoyer une « lettre de licenciement » à son supérieur hiérarchique. Dès lors, c’était elle ou lui, et ce fut elle. Aujourd’hui, le portail vivote sous une forme largement réduite et le système d’information et d’aide à la décision de la fédération n’a manifestement pas vu le jour. « Au lieu de développer des outils facilitant la constitution d’offres globales permettant à plusieurs entreprises de concourir aux appels d’offres auxquels elles ne peuvent répondre seules, au lieu de permettre à cette fédération d’améliorer son positionnement stratégique et sa productivité, l’argent public a été utilisé pour financer deux fois la même chose avec un périmètre des plus restreints », regrette Héloïse.

l’histoire relatée dans un manuscrit, Aujourd’hui en quête d’éditeur

Mais ça n’est pas tout : en 2004, la jeune femme, qui a retrouvé du travail, tombe sur l’appel d’offres d’une chambre de commerce et de l’industrie proposant de développer pour le même secteur industriel en région parisienne ce qui l’avait déjà été pour la fédération… « Les cofinanceurs du projet n’ont même pas vérifié si le ministère de l’Industrie dont ils dépendent avait déjà subventionné un projet analogue. L’absence totale de contrôle des fonds publics attribués aux organisations professionnelles favorise le parasitisme. Profitant des failles de la décentralisation, les organisations patronales multiplient les structures bidons pour capter des fonds publics qui ne reviennent pas forcément aux entreprises. Les corps de contrôle de l’État ne font pas leur travail, déplore-t-elle. Ils n’en ont pas la volonté, ou ils ont peur : « Ne mentionnez pas mon nom », m’a lancé un jour un agent de la répression des fraudes. Le ministre de l’Économie était alors Francis Mer, l’ancien vice-président du MEDEF. « Vous pensez bien qu’il ne fera rien contre une fédération patronale, m’avait-il dit. Je risque pour ma part de gros ennuis si l’on apprend la teneur de nos échanges. » Quand un policier commet une bavure, n’importe quel citoyen peut saisir directement l’IGPN. Par contre, dès qu’il s’agit de l’argent public, le citoyen est dépossédé de tout pouvoir de contrôle. On est dans une culture de la défaillance du politique. Depuis des décennies, les entreprises françaises sont pénalisées par leur positionnement intermédiaire et la faiblesse de leurs exportations, nous répète-t-on toujours. Pourtant, des milliards sont consacrés chaque année pour y remédier. Qui gère cet argent et pour quel résultat ? Combien gèrent les chambres consulaires présidées par les chefs d’entreprise, les organisations patronales et leur myriade d’associations de promotion et de développement ? Je parle aujourd’hui parce que ce déficit démocratique et ces carences de l’État de droit se traduisent par une grande inefficacité économique. Combien cette gabegie coûte-t-elle de points de croissance ? »

Aujourd’hui, pour combattre ses illusions perdues sur les « forces vives » du patronat, Héloïse a choisi de relater son histoire dans un manuscrit en quête d’éditeur. Le titre claque : Des vampires chez les patrons. « Ce que je veux à présent ? Une réforme des organisations patronales, auxquelles il faut imposer la transparence de leurs comptes et une obligation de résultats, une refonte de l’action publique notamment en matière de développement économique, et un renforcement du contrôle démocratique de l’utilisation des fonds publics. » Héloïse observe les atermoiements judiciaires dans l’affaire UIMM non sans inquiétude, mais avec la volonté de se battre pour une société plus transparente, plus juste et plus efficace.

(1) Le prénom a été changé.

Thomas Lemahieu

6 décembre 2007

J'ai failli rater ça - épisode 1

Beau titre n'est-ce pas ?

Le Charançon libéré m'a appris (avec retard) que Florent Pagny sortait un album de chansons de Brel. Je suis moi aussi consterné que le chanteur de "la liberté de voler" * reprenne sans vergogne les titres de cet homme remarquable.

Juste la fin de son post :

Après tout, Pagny reprenant Brel, c'est un peu comme Sarkozy citant Jaurès.

Ou Ségolène se réclamant du socialisme.

Non ?

Si.

* Ah si, note nécessaire :
Le chanteur Florent Pagny a été condamné jeudi 27/01/05 à 15.000 euros d'amende pour fraude fiscale par la cour d'appel de Versailles.

Elle s'est montrée plus clémente que le tribunal correctionnel de Versailles qui, l'an dernier, l'avait condamné en première instance à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 15.000 euros d'amende. Lors de l'audience du 9 décembre, l'avocat général de la cour d'appel avait requis contre lui 8 mois de prison avec sursis et 25.000 euros d'amende.
Ni Florent Pagny ni Pascal Nègre, PDG d'Universal Music, n'ont assisté à l'audience.
Le chanteur était poursuivi pour ne pas avoir déclaré ni payé de TVA pour l'année 1997, pour un montant de près de 48.000 euros, d'avoir minoré de plus de 540.000 euros ses revenus des années 1996 à 1997 et d'avoir détourné des objets qui devaient être saisis pour payer un important arriéré d'impôts. Mais surtout, l'administration fiscale affirmait qu'une somme d'un million d'euros versée début 1996 par sa maison de disques n'était pas un prêt, comme il l'affirmait, mais une avance sur recettes qui aurait du être soumise à l'impôt. Comme le tribunal correctionnel, la cour d'appel a estimé qu'il s'agissait bien d'un prêt et a relaxé le chanteur de ce délit. Pascal Nègre, poursuivi pour "complicité de fraude fiscale", a vu sa relaxe de première instance confirmée.