8 février 2007

Arbeit macht frei

Un excellent article d'Agnès (le Monolecte) dans Agoravox sur le travail du dimanche. Je suis 100 % d'accord avec son analyse. Un plaisir donc de la redonner ici.
Au sujet de l’ouverture des commerces le dimanche

Certes, je bosse le dimanche. Mais c’est moi qui le décide, parce que j’organise mon travail comme je l’entends. Donc, je bosse le dimanche, ce qui fait que j’ai peu de temps pour écrire au sujet du travail le dimanche. Heureusement, je prend toujours le temps de papoter avec mes potes actuchômistes sur les forums et voici ma modeste contribution à ce qui devrait être un grand débart de société: la place relative du travail dans notre organisation sociale (je ferai mieux un peu plus tard, promis!).

Les gens sont pour l’ouverture des commerces le dimanche parce qu’ils sont égoïstes et très très cons.

Ils se disent : chouette, je vais faire mes courses le dimanche.
Ce qui montre déjà la pauvreté de leur vie privée, s’ils ne peuvent consacrer un malheureux jour par semaine à leur famille, leurs amis, à lire, à se ballader, ou même, juste, à penser.
Cela montre aussi leur connerie : parce que dans leur tête, ils évacuent le fait que pour qu’ils fassent leurs courses le dimanche, leur jour de repos, il faut que d’autres s’en passent, et ne consacrent pas ce temps à leur famille, leurs amis.
On peut toujours me raconter que c’est sur la base du volontariat. Dans les faits, nous savons tous qui décide.

Le commerce, c’est aussi beaucoup de mère célibataires qui ont des salaires de misère et qui voient déjà fort peu leurs gosses. Si le dimanche devient un jour travaillé normal, pas de prime pour ce jour-là, mais des frais en plus : comment trouver et payer une nounou ce jour-là ? Comment élever ses gosses sans ne plus les croiser ? Quand les mouflets, livrés à eux-mêmes, feront n’importe quoi à l’adolescence, il se trouvera les mêmes bonnes âmes pour leur jeter la pierre et demander la suppression des subsides sociaux de leurs mères qui n’ont rien fait d’autre que de se tuer à la tâche pour un salaire de merde.
Tant d’égoïsme me révolte !

Mais surtout, ils sont très, très cons les amateurs de courses le dimanche.

Parce que si le dimanche devient un jour travaillé pour le commerce, il y a plein de besoins annexes à satisfaire : des livraisons de denrées le dimanche (roule petit camion, bosse petit livreur), des vigiles, des administratifs, en cas de pépin, les transports en commun pour acheminer tous ces abrutis de consommateurs, des banques, pour que le pognon tourne sans fin, le courrier, pour que les ordres de paiement circulent, donc des transports de fond aussi, et les flics qui vont avec. Si le flux de marchandises ne se fige pas le dimanche, il n’y a aucune raison d’arrêter de produire ce jour-là : ouvrons les usines, et leurs fournisseurs et les prestataires de service qui gravitent autour. Si mon réseau informatique plante le dimanche en pleine pointe de production, il faudra des informaticiens sur le pied de guerre, et ainsi de suite.
Si on ouvre une brèche dans le repos du dimanche, ils vont être plein de gentils patrons de tous les secteurs à gueuler : pourquoi pas moi ?
Et on va leur répondre avec une fausse naïveté : ben oui, c’est vrai, ça, pourquoi pas vous ?

Et une fois que tout le monde bossera le dimanche, les amateurs de courses le dimanche devront probablement demander l’ouverture des magasins la nuit ! Les cons !

Car en moyenne, les gens qui aimeraient bien faire leur courses le dimanche partent du principe que cela reste leur jour de repos. D’ailleurs, si on leur demandait plutôt s’ils aimeraient travailler le dimanche, que le dimanche soit un jour de travail comme les autres, je pense qu’il y aurait nettement moins de volontaires.
Cons... et égoïstes !

Le repos dominical n’avait que 100 ans.
Ce ne sont pas les travailleurs qui l’avaient arraché au patronat mais bien le patronat qui l’avait concédé aux travailleurs, pour pallier à leur manque de productivité dû à une fatigue trop grande.

Enfin, il n’y a que très peu de chance que cela crée des emplois en plus. Depuis les 35 heures, nous avons bien compris que l’embauche ne se fait qu’au compte-gouttes et en dernier recours.
Bien avant, il y a les heures sup (surtout qu’elles sont largement non payées), les roulements de salariés en place, l’augmentation de la productivité, et les stagiaires. Et après, en dernier recours, les emplois précaires jetables à temps partiel.

Au final, tout le monde bossera n’importe quand, n’importe comment et je me demande qui trouvera encore le temps d’aller faire ses foutues courses le dimanche. Alors passer du temps avec sa famille, ses amis, je vous laisse imaginer...

4 commentaires:

  1. Salut,
    Je trouve l'article un peu violent... et pas très intelligent en fait. En France, on a du mal à trouver un juste milieu entre ce qui est "obligatoire" et ce qui est "interdit". Il me semble donc que la question de l'ouverture des commerces le dimanche ne se pose pas en ces termes. Il ne s'agit pas "d'obliger" les gens à travailler le dimanche, mais bien plutot de laisser la liberté à ceux qui le souhaitent de travailler ce jour là où, rappelons le, les salariés touchent 200% de leur salaire horaire. Chez moi, l'ouverture du dimanche se fait sur la base du volontariat des salariés. En général, les plus âgés ne le souhaitent pas, mais tous les plus jeunes se jettent dessus. C'est mieux payé et ils ont un jour et demi de repos compensatoire en semaine.
    Stéphane

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  2. Je pense que parfois la virulence est nécessaire, un peu comme un certain "coup de boule".

    La "liberté" c'est plutôt "pas le choix", comme le dit Agnès ce sont souvent des travaux peu qualifiés sur lesquels se "jettent" des quasi-précaires...

    Et 200 % de rémunération, c'est "dans vos rêves", dans la pratique les contrats de travail sont refaits pour banaliser le travail du dimanche (comme celui de nuit, c'est un ancien délégué du personnel qui vous parle en connaissance de cause - on propose une modif du contrat et en cas de refus on licencie pour motif personnel). Et pour ce qui est de la compensation, être au repos quand vos enfants sont à l'école, ça n'arrange pas la vie de famille...

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  3. Manière, cet article n'a pas du tout été compris. Du coup, j'ai du en réécrire un autre made in Groland, mais même là, ça coince.

    Les gens sont devenus tellement consumméristes qu'ils ne voient pas plus loin que le bout de leur caddy.
    Des fois, mais seulement des fois, je me dis que 5 ans de nabot sociopathe, ça leur fera les pieds!

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  4. eh oui travailler plus pour gagner plus d'argent,un concept que le patronat nous a bien vendu et on y tombe a pied joint .
    le seul jour de repos qu'il te reste sera consacré soit au boulot ,soit a faire encore et encore des achats.effectivement quelle foutaise(pour rester poli).la liberté !tu parles.
    paz

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