22 février 2008

Démocratie en péril

Un très bel article de Bernard Langlois dans Politis, qui revient sur un titre accrocheur de Libération qui critique deux penseurs indépendants (une espèce rare et si éloignée des pseudo-philosophes imposteurs du type BHL). Un extrait que j'ai apprécié :

Comment ne pas applaudir à ceci : « Modèle américain ou modèle chinois, je ne veux pas vivre dans ce choix. » ( Zizek). Et à ceci : « Il faut réinventer des modalités de mobilisation populaire.[...] Je n’aime pas la violence physique, j’en ai peur, mais je ne suis pas prêt à renoncer à cette tradition de la violence populaire. Cela ne veut pas toujours dire violence sur les personnes. » (Zizek encore.) Bien entendu, dans la phrase précédente, c’est l’adverbe « toujours » qui fera sauter en l’air nos humanistes démocrates : « Ah, vous voyez bien, il n’exclut pas la violence sur les personnes ! » Et vous, vous l’excluez, cette violence-là ­cent, mille fois plus fréquente et féroce­ que le marché, le capitalisme, sa loi d’airain et ses gardes prétoriennes, par les violations quotidiennes des droits de l’homme par eux engendrées (toutes les semaines, on se pend en prison, on se jette par la fenêtre pour échapper aux expulsions, on crève de froid et de faim sous les néons des boutiques de luxe, on se saoule et se drogue pour tenter d’oublier qu’on n’a aucun avenir, on se fait pute pour payer son loyer ou nourrir son môme...), que cette société de merde, dirigée par des crapules et/ou des incapables, impose au peuple prétendument souverain, dites, vous l’excluez ? Ah, il est plus facile d’aller faire de la retape au dîner du Crif et d’inventer, au nom du « devoir de mémoire », je ne sais quel projet d’adoption virtuelle des pauvres petites victimes juives (et merci à Simone Veil d’avoir promptement flingué cette connerie) que d’offrir une vie acceptable à des milliers de pauvres petits vivants ­ceux à qui on promet des « plans Marshall » (mais non financés) et qui ne voient débarquer que des bataillons de flics suivis d’escadrons de journaleux. Ah, la belle politique, la délicieuse démocratie !

« Le drapeau, la patrie, le civisme, la morale », dit-il. Qui ça ? Le grand copain de Balkany-les pots de vin, Doc Gyneco-la fumette, Johnny-l’Helvète, Bolloré-le voyagiste, Idriss Deby-l’humaniste, et tant d’autres que, quand on les croise, on change vite de trottoir pour respirer plus pur. Et Dieu, dans tout ça, sacré Chancel (aussi un ami du président bling-bling) ! Dieu, on s’en tape ; mais la religion, pour les faire tenir tranquille, hein (Napoléon le professait déjà, mais il avait légèrement plus de classe) ! « Opium du peuple », disait l’autre vieux barbu, qui n’habitait pas, lui, dans les nuages. Au fait, voulez-vous que je vous dise, la violence : je la redoute aussi, moi. Celle des désespérés, qui n’ont lu ni Badiou ni Zizek. « Les émeutes de banlieues en France sont nées d’un mécontentement non-articulé à une pensée, même de façon utopique. C’est ça, la tragédie. » (Zizek)

Le reste ici.

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